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22 May

Bande dessinée historique : "Ellis Island" de Philippe Charlot et Miras (Ed. Bamboo, GrandAngle)

Publié par Dominique Rech  - Catégories :  #Bande dessinée historique, #Histoire contemporaine

« Tu y débarques un Italien, un Allemand, un Irlandais, un Juif, un Russe et il en sort un Américain…!  »

Tonio va tenter sa chance en Amérique. Dans son village de Sicile, chacun s’est cotisé pour lui payer la traversée. Plein d’enthousiasme et d’illusions, Tonio débarque sur Ellis Island mais est repoussé par l’officier d’immigration du fait de sa jambe handicapée. Tonio se retrouve à la merci d’un avocat véreux profitant de la misère des immigrants qui lui fait miroiter un dossier d’appel pour autoriser son entrée. En échange, le jeune homme lui servira de rabatteur auprès des nouveaux arrivants, proies faciles pour un homme sans scrupules. Tonio se résigne à accepter l’offre. Il ne peut trahir les espoirs qui ont été mis en lui.

 

Mon opinion : Dès la première page, le décor est planté : c'est le récit cruel de la corruption et de la violence de ce centre, un des passages obligés pour les migrants depuis 1892. Une porte construire par des architectes français dans le style pompeux d'une gare faisant l'apologie du "mirage des Etats Unis", "pays de la liberté, de la paix et de la fortune, si tu travailles beaucoup". La "Porte Dorée" est devenu musée depuis 1990, avec son "Wall of Honor" qui liste les 700 000 immigrants passés par là.

La réalité est tout autre pour Tonio et Giuseppe, deux italiens pauvres modestes qui débarquent à Ellis Island. Tonio a un léger handicap physique, il boite. Et pourtant, les habitants de son village natal ont collecté suffisamment d’argent pour qu’il puisse se payer un billet pour l’Amérique, espérant en retour la fortune. Giuseppe, quant à lui, vient rejoindre un "oncle" qui lui a promis un emploi. Ces 2 italiens vont voir leurs rêves briser quand les services de l’immigration mettent leur véto pour qu’ils puissent poser le pied sur le nouveau monde. Un avocat véreux, auteur hypocrite de la scène va proposer son soutien à Tonio contre des services mafieux.

Les plus fragiles des migrants sont traités comme du bétail, essayant de faire bonne figure malgré la peur des évaluations  arbitraires du service de l’immigration. Si 80 % passent, 18 % sont coincés sur cette île avec la peur d'y mourir ou d'être obligé de payer un billet retour pour l’Europe (2 %).

L'ambiance est volontairement lourde, réaliste. Le récit est enrichi par de multiples flashbacks qui permettent de comprendre que Tonio est en réalité l’instrument d’une machination machiavélique d’un parrain sicilien.

Miras réussit un pari difficile avec sa maîtrise du dessin volontairement grotesque dans son réalisme (dans la lignée d'u film "America America" d'Elia Kazan en 1964) et une colorisation lumineuse qui rendent éblouissant voir élégant cet entre-deux-mondes qu’est Ellis Island.

Le volume se termine par un dossier documentaire très bien fait de Farid Ameur, docteur en Histoire à l'université Paris-1 Panthéon-Sorbonne.

Magnifique album, que je recommande fortement.

 

Que faire quand vous vous retrouvez coincé, à la merci d’une administration inhumaine ? Que faire quand tout un village a misé sur vous et n’a plus pour espoir que l’argent que vous pourrez lui envoyer ? Que faire quand la femme que vous aimez désespère de venir vous rejoindre ? Que faire quand, la seule personne qui vous tend la main est un avocat véreux et sans scrupules ? Que faire quand, pour vous laisser survivre, on vous oblige à tuer ? Que faire…?  

Mon opinion : Une suite bien construite, plus intimiste. Puisque Tonio essaye de sortir de son dilemme et doit affronter la mesquinerie jalouse de son frère. A quand la suite ?

 

 

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